- honnir
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• XIIe; frq. °haunjan → honte♦ Vieilli ou littér. Dénoncer, vouer au mépris public de façon à couvrir de honte. ⇒ blâmer, conspuer, vilipender, vomir. Il est honni partout, par tout le monde. « Vous commencez vous-même à honnir, à proscrire » (A. Gide). — Loc. (souvent iron.) Honni soit qui mal y pense ! honte à qui y voit du mal (devise de l'ordre de la Jarretière, en Angleterre). ⊗ CONTR. 1. Louer; encenser. Honorer.honnirv. tr. Couvrir publiquement de honte. Je ne laisserai personne me honnir.— Vieilli ou litt. être honni de, par qqn, lui inspirer de la haine et du mépris.|| Honni soit qui mal y pense!: honte à celui qui y voit du mal.⇒HONNIR, verbe trans.Littér., vieilli. Désigner quelqu'un, quelque chose comme méprisable et condamnable en tant que transgressant une norme éthique ou une convenance ou s'y opposant. Anton. honorer, louer, priser. Honnir la facilité. Il est honni partout (Ac. 1798-1878). Vous voulez donc donner gain de cause aux libéraux, à ces jésuites de Robespierre qui s'efforcent de honnir la noblesse (BALZAC, Langeais, 1834, p. 328). On attendait M. Jeufroy pour fixer ensemble la date du mariage, qui aurait lieu à la mairie bien avant de se faire à l'église, afin de montrer que l'on honnissait le mariage civil (FLAUB., Bouvard, t. 2, 1880, p. 146) :• Je me rappelle qu'à Guermantes je m'étais fait honnir de ma belle-mère parce que j'avais dit de descendre du grenier tous les splendides meubles Empire...PROUST, Guermantes 2, 1921, p. 517.Rem. Aux premières pers. du prés. de l'ind. l'emploi de ce verbe est performatif. Ce que tu appelles l'haleine de la ville corrompt souvent, je l'avoue, corps et âme (...). Je honnis cet appétit de luxe et de plaisir, ce besoin effréné d'argent où sombrent les consciences (PESQUIDOUX, Livre raison, 1932, p. 225).— Emploi pronom. réfl. Tu ne dois pas désespérer, ni te honnir. Ton chagrin, aujourd'hui, t'égare (LA VARENDE, Man' d'Arc, 1939, p. 383).Prononc. et Orth. : [
] init. asp., (il) honnit [
]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. a) Ca 1100 hunir « couvrir de honte publiquement, déshonorer » (Roland, éd. J. Bédier, 631 et 969); b) 1269-78 honi part. passé (J. DE MEUNG, Rose, éd. F. Lecoy, 10440). De l'a. b. frq. haunjan « railler, insulter » (de même racine que honte) que l'on peut restituer d'apr. le got. haunjan « humilier, abaisser » (dér. de hauns « bas »), l'a. h. all. hônen, le m. néerl. honen « déshonorer; débaucher; corrompre » et l'all. höhnen « railler, bafouer ». Fréq. abs. littér. : 40. Bbg. WALT. 1885, p. 79.
honnir ['ɔniʀ] v. tr.ÉTYM. 1080, honir, Chanson de Roland; du francique haunjan (cf. all. höhnen), dér. haunita. → Honte.❖1 Vieilli ou littér. Dénoncer, vouer à la détestation et au mépris publics de façon à couvrir de honte. ⇒ Ahonter (vx), blâmer, conspuer, mépriser, vilipender, vomir, vouer (à l'aversion, à l'opprobre, aux gémonies). || Les révolutionnaires avaient honni, vitupéré, anathématisé (cit. 2) les émigrés. — Passif. || Un milieu aigri (cit. 17) où le gouvernement était honni. || Il est honni partout, par tout le monde. || Être honni par un adversaire dont on gêne (cit. 15) l'intérêt.1 Les académiciens qui s'attendaient à être sifflés, honnis, bafoués, n'osaient se montrer.2 Je suis quelquefois honni dans ma patrie; les étrangers me consolent.Voltaire, Lettre à d'Argental, 3904, 8 juil. 1772.3 Vous honnissez de pauvres créatures qui se vendent pour quelques écus à un homme qui passe (…)Balzac, la Femme de trente ans, Pl., t. II, p. 752.4 — Vous allez aller comme vous êtes à l'enterrement de monsieur ? C'est une monstruosité à vous faire honnir par tout le quartier (…)Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 769.5 (…) à mesure que sa gloire (de Sainte-Beuve) monte et que son œuvre prend plus de place (…) un plus grand nombre d'exégètes, de critiques et de biographes se sont, ces dernières années, emparés de lui pour l'expliquer et le tirer à soi, décrier ses mœurs et son caractère, honnir l'homme, ou même lui dénier toute qualité de juge littéraire.Émile Henriot, les Romantiques, p. 212.6 — Napoléon en Espagne (…) l'empereur, vêtu de son habit vert, passait à cheval en vainqueur au milieu d'habitants qui semblaient le honnir par leur attitude sourdement menaçante.Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, p. 166.♦ (Complément nom de chose) :7 Nous entendons honnir, parfois, globalement toute une époque (…)Gide, Attendu que…, I.♦ Absolument :8 — Attention ! vous commencez vous-même à honnir, à proscrire.Gide, Attendu que…, II.2 Vx. ⇒ Déshonorer.9 Quoi ! ne tient-il qu'à honnir des familles ?Pour vos ébats nous nourrirons nos filles !La Fontaine, Contes, « Le berceau ».——————honni, ie p. p. adj.ÉTYM. (V. 1270).♦ || Honni et cloué (cit. 6) au pilori. || Honni et excommunié (cit. 5).♦ Honni soit celui qui… (→ Carence, cit. 1). ☑ Honni soit qui mal y pense ! : honte à celui qui y voit du mal. — REM. Cette formule (enregistrée par Furetière, 1690), qui a d'abord été la devise de l'ordre de la Jarretière en Angleterre, s'emploie avec ironie pour blâmer ceux qui pourraient voir une allusion scabreuse dans les actes ou les propos les plus honnêtes.10 Il ne prit ni cocher, ni groom, ni gouvernante,Mais (honni soit qui mal y pense !) une servante.A. de Musset, Premières poésies, « Mardoche », X.11 Le dîner n'est pas le dernier repas des voraces Anglo-Saxons. Ils ont encore le souper, où réapparaissent le thé et les viandes froides; on y sert aussi les confitures. Tout cela est prévu, calculé, et malheur à l'infidèle qui voudrait intervertir cette rigoureuse discipline. D'un bout à l'autre du Royaume-Uni, il serait poursuivi, vilipendé, et on lui appliquerait le dicton national : Honni soit qui mal y pense !❖CONTR. Louer. — Encenser. — (Du sens 2) Honorer.
Encyclopédie Universelle. 2012.